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Sur la colline du Bollenberg


Le dernier stage géologique organisé par le CFPPA de Rouffach (68), avait comme thème central la colline du Bollenberg à Orschwihr (68). Il était animé par Yannick Mignot, géologue et formatrice. Une quinzaine de participants a pu profiter de cette journée passionnante à tous égards, dans une ambiance chaleureuse et ouverte, où les questions n’ont pas manqué.

Nous remercions Frédéric Schmitt (domaine François Schmitt) pour son accueil et la mise à disposition de ses locaux pour le repas et la séance de dégustation.


Une localisation particulière

La situation géographique du Bollenberg est intéressante. Situé à l’extrémité est du massif vosgien, il constitue le dernier relief avant la plaine d’Alsace. Protégé à l’ouest par le Grand Ballon et le Petit Ballon, il ne reçoit que très peu de précipitations (400 mm et 500 mm par an), ce qui lui confère un climat de type méditerranéen avec des caractères continentaux. La descente rapide et le réchauffement des masses d’air depuis les sommets vosgiens conjugués à des vents chauds renforcent cet aspect climatique. Du fait de son climat et de sa géologie, on trouve sur le Bollenberg une faune et une flore particulières.

Depuis le sommet du Bollenberg on profite d’une belle vue sur les Vosges à l’ouest (Grand Ballon et Petit Ballon), la plaine d’Alsace à l’est avec la Forêt Noire. Par beau temps on peut même admirer les Alpes bernoises. Au nord du Bollenberg se trouve la Vallée Noble où coule la rivière Ohmbach, laquelle a creusé son lit en suivant une faille. Le versant opposé de cette vallée est dominé par le Zinnkoepffle et le Strangenberg.

De forme triangulaire, le Bollenberg est situé dans le champ de failles de Rouffach-Guebwiller. On y observe une particularité : entre les deux failles principales, (vosgienne et rhénane) et alignée sur un axe nord-sud, on observe une faille supplémentaire nommée faille de Marbach. Celle-ci délimite le Bollenberg à l’ouest alors qu’à l’est c’est la faille rhénane qui constitue son extrémité.

Les sols du Bollenberg sont plus profonds sur les parties basses avec une présence de marnes par endroits. Sur sa partie sommitale les sols sont peu profonds , la roche affleurant en maints endroits. Les réserves hydriques sont faibles sur les étendues supérieures. Une zone haute, hors vignoble, constituée de pelouses sèches est classée Natura 2000 (en couleur claire sur la carte) et protégée au titre de sa faune et de sa flore. Elle constitue un centre d’intérêt réputé pour les amateurs qui viennent de toute l’Europe.

Lors de notre parcours, nous avons pu observer quelques orchidées en fleurs, ceci fera l’objet d’un article séparé.

Au sommet du Bollenberg se trouve la chapelle Sainte Croix reconstruite du 19ème siècle sur des vestiges médiévaux. Celle-ci est le théâtre chaque été dans la nuit du 14 au 15 août, du spectaculaire « Haxafir », au cours duquel une poupée/sorcière est brûlée sur un bûcher par les conscrits… La mention « Chapelle » est parfois spécifiée sur les étiquettes pour les vins produits juste en-dessous de la construction.

Le Bollenberg est flanqué de trois lieux-dits : Luft, Neuberg et Effenberg. Le classement en Premiers Crus est revendiqué pour les quatre (voir carte).


Une géologie dominée par le calcaire

La géologie du Bollenberg est largement dominée par le calcaire, mais celui-ci a plusieurs origines selon les secteurs et peut-être mêlé à d’autres roches. En partant du village d’Orschwihr, le premier lieu-dit abordé montre un sol de couleur ocre-rouge : c’est le Luft. Exposé ouest sud-ouest, la toponymie nous indique un lieu marqué par des flux d’air.


Sur la droite on voit la couleur que la couleur du sol du Luft est davantage ocre-rouge.

L’ensoleillement de fin de journée y éclaire un tableau magique ! Le sol est constitué de calcaire gréseux ferrugineux qui s’est formé au cours de l’Aalénien (Secondaire, Jurassique) et de marnes. On y produit un pinot noir de grande qualité.

Calcaire gréseux de l'Aalénien

En remontant vers le sommet, le sol change brusquement de couleur et passe sur un brun plus marqué. Nous nous trouvons sur des marnes et du calcaire argileux datant du Bajocien inférieur et moyen (Secondaire, Jurassique), une période postérieure à la précédente d’environ 4 millions d’années.

En remontant encore on découvre des calcaires durs, qui affleurent à certains endroits : il s’agit de la dalle de calcaire oolithique formée à la fin du Bajocien. Ce calcaire dur a subi de fortes pressions lors de l’effondrement du fossé rhénan du Paléocène à l’Oligocène et a été largement fissuré, permettant l’infiltration de l’eau.

Calcaire oolithique du Bajocien

Le sommet de la colline n’est pas couvert par la vigne mais par une pelouse rase. Le sol y est très mince, une quinzaine de centimètres à peine voire moins, et la roche affleure souvent.

La roche affleurante

Il s’agit d’un ensemble de conglomérats et de marnes formés au cours du Lattorfien (Tertiaire, Eocène supérieur et Oligocène inférieur). Cette formation est plus récente et est datée de 37,8 à 32 millions d'années. Elle est l’une des conséquences de l’effondrement du fossé rhénan et du jeu de l’érosion qui a mené à la formation de conglomérats côtiers. Cette roche est formée de galets d’origines diverses et de débris cimentés par un calcaire. Elle est dure et peu fissurée car elle est postérieure à l’effondrement rhénan et n’a pas subi les mêmes modifications que le calcaire oolithique du Bajocien. De fait, l’installation de la végétation y est difficile.

Prairie sèche au-dessus des vignes, avec Orschwihr au fond

En redescendant sur la face est de la colline, nous nous retrouvons dans une zone basse comprenant des placages de lœss (calcaire) déposés par voie aérienne au cours du Pléistocène (Quaternaire), il y a moins de 2 millions d’années. Dans cette zone les sols sont plus profonds et ne posent pas de problèmes hydriques.


Ce tour du Bollenberg a mis en évidence un certain nombre de points :

1) La dominante est calcaire, avec des variations en fonction des époques.

2) Plusieurs secteurs y revendiquent des particularités du point de vue de la géologie et des sols. Les viticulteurs sont attentifs aux subtilités des terroirs.

3) La formation des sols s’étale sur une période très longue (de -174 à -2 millions d’années).

4) Le microclimat de la colline a une influence forte sur les caractéristiques des vins.


Une fois de plus, Yannick Mignot a su nous captiver par ses compétences et nous transmettre sa passion. Ses explications claires et bien illustrées ont permis à chacun d’appréhender le site sous un angle neuf et éclairé.

La journée s’est clôturée par une dégustation de vins du Bollenberg fournis par les viticulteurs présents, ce qui a permis de comparer les différents terroirs. Une trame commune a été repérée, autour de la géométrie du vin, de la salivation abondante et de la finesse du grain.

Ce fut évidemment somptueux.






Michel Haber

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